Acteur connu pour son incarnation de Tony Blair dans le film The Queen de Stephen Frears, celle du journaliste David Frost dans Frost/Nixon de Peter Morgan ou encore ses rôles dans Twilight ou la série «A Very Royal Scandal», Michael Sheen s’est distingué il y a quelques mois dans un tout autre domaine.
Confrontés au déclin de l’industrie métallurgique et sidérurgique au Royaume-Uni, de nombreux ouvriers se retrouvent sur le carreau (c’est le cas de le dire pour des mineurs), avec des dettes qu’ils n’arrivent plus à rembourser. C’est notamment le cas dans la région d’origine de Michael Sheen, le sud du pays de Galles et, plus spécifiquement, Port Talbot.
En 2021, Michael Sheen avait déjà déclaré avoir gagné suffisamment d’argent et désirait désormais utiliser ses gains d’acteur pour de bonnes causes, devenant ainsi un «acteur à but non lucratif». Dont acte. Précédemment il avait déjà financé une nouvelle compagnie de théâtre après la fermeture du National Theater Wales ainsi que la Coupe du monde 2019 de foot des sans-abri organisé à Cardiff, en vendant deux de ses maisons.
Cette fois, il a procédé de la manière suivante: acquérir les dettes de 900 ouvriers touchés par la fermeture du dernier haut-fourneau de Port Talbot, à un prix inférieur à leur valeur, à l’instar des sociétés de recouvrement avec rachat de créances. Il a donc lui-même créé une de ces sociétés, ce qui a pris près de deux années. Déboursant 120.000 euros pour des dettes d’une valeur de un 1,2 million d’euros, il les a ensuite effacées des tablettes des débiteurs.
Ne se contentant pas de ce geste philanthropique, il a ensuite participé à la conception d’un documentaire diffusé sur Channel 4 (https://www.channel4.com/programmes/michael-sheens-secret-million-pound-giveaway), mettant en exergue les procédés plus que douteux de ces sociétés de recouvrement et espérant ainsi entraîner un changement des pratiques.
À l’approche des fêtes, on serait tenté d’encourager d’autres personnes bien nanties à faire de même, mais les gestes philanthropiques, si bien intentionnés soient-ils, ne sont sans doute pas suffisants: appelons de nos vœux que les négociations actuellement en cours chez nous à propos d’une procédure plus efficace d’effacement des dettes des particuliers puisse aboutir. Autre solution sans doute plus radicale: un partage plus équitable des richesses et, soyons fous et à contre-courant, plutôt que de s’enfermer pendant trois jours dans un cube en verre, le renforcement de la sécurité sociale pour lutter contre la pauvreté.
Nathalie Cobbaut,
rédactrice en chef des Échos du crédit et de l’endettement