Klarna & Cie: attention, danger d’addictions!

On a déjà abordé dans ces lignes ce concept du BNPL, de l’anglais «Buy now Pay later», en français «Achetez maintenant, payez plus tard». Dans le numéro des Échos du crédit du mois de mars, la rubrique «On nous écrit, on nous demande…», rédigée par Cédric Dony, juriste au Gils, se penchait sur cette nouvelle manière d’acheter à crédit, alors que techniquement il ne s’agit pas d’un crédit, ce qui a pour effet que les protections juridiques qui s’y rattachent ne s’appliquent guère[1].

Le principe: distinguer les moments de consommation et de paiement, en y associant la possibilité d’étaler les paiements en plusieurs tranches. Parmi les opérateurs qui proposent aujourd’hui ce nouveau produit: Klarna Bank AB, un prestataire de services de paiement suédois parmi les plus offensifs. Alors qu’il s’était développé jusqu’ici sur les sites de commerce en ligne, on retrouve aujourd’hui ce mode de paiement dans les enseignes physiques, et il progresse à pas de géant, notamment auprès d’un public jeune qui n’est pas forcément le plus averti. Une étude de l’association AB-REOC intitulée «Les systèmes de post-paiement, la pente glissante vers le surendettement?»[2] montre les dangers de cette nouvelle technique et pointe la génération Z (les 18-21 ans) comme étant la plus visée.

Deux hics conséquents de cette technique: le fait que les coûts en cas de retard de paiement des différentes tranches sont élevés et, par ailleurs, que les règles entourant l’octroi de crédit en Belgique ne s’appliquent pas au «Buy now Pay later», entre autres l’enquête de solvabilité. Ce qui est évidemment extrêmement dangereux, puisque l’achat du bien est découplé de son paiement sans qu’aucune enquête ne soit faite sur la capacité à rembourser sa dette. Une situation qui pourrait changer avec la transposition de la directive européenne sur le crédit d’ici au 20 novembre 2026, laquelle a intégré les applications BNPL dans le champ d’application de cette directive.

Pourquoi parler de ce mode de paiement dans cet édito? Car le dossier de ce numéro de septembre porte sur les addictions qui sont présentes chez des personnes surendettées et qui viennent grever les dossiers de médiation de dettes. Si le tabagisme, l’alcoolisme ou la toxicomanie sont évidemment les plus présents dans les dossiers, des comportements addictifs apparaissent également, comme les jeux de hasard ou encore les achats compulsifs, largement promus par des systèmes comme les applications BNPL. Le fait de minimiser le montant des paiements par leur fractionnement pousse à une consommation non réfléchie et répétée, sans plus de contrôle des dépenses. L’absence d’enquête de solvabilité permet donc à des personnes exclues du système régulier du crédit de s’endetter sans modération. Avec le risque d’addiction, doublé des conséquences financières pour le particulier et environnementales liées à une telle consommation effrénée, notamment dans le domaine de la fast fashion, on ne peut que s’interroger sur les conséquences de ces procédés pour les humains et la planète.

Nathalie Cobbaut

[1] https://www.echosducredit.be/klarna-paiement-differe-endettement-postpose/

[2] https://economie.fgov.be/fr/publications/les-systemes-de-post-paiement